PMA : liberté, égalité, sororité

En juin 2017, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) publiait un avis favorable à l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Un an plus tard, la PMA pourrait être détachée de la révision de la loi sur la bioéthique prévue pour 2019 et faire l’objet d’un projet de loi déposé d’ici la fin de l’année.

La PMA, procréation médicalement assistée (également connue sous le nom d’assistance médicale à la procréation), regroupe l’ensemble des techniques médicales visant à répondre à une ou des infertilités. Ces techniques incluent la conception in vitro, le transfert d’embryon et l’insémination artificielle.

Depuis 1994, elle est autorisée en France pour les couples hétérosexuels mariés ou en concubinage depuis au moins deux ans, en situation d’infertilité médicalement constatée. Ce diagnostic permet au médecin, après sa confirmation par des tests chimiques et biologiques, d’orienter les patients vers une procédure de PMA.

Une question d’égalité

Les femmes seules et/ou homosexuelles sont, de fait, interdites d’accès à la PMA en France. Si la légitimité du désir de parentalité d’une femme hétérosexuelle mariée et infertile n’est pas contestée, pourquoi n’accorde-t-on pas la même bienveillance aux femmes célibataires ou aux couples de lesbiennes ? La supposition implicite est que nous sommes toutes égales, mais certaines plus que d’autres…

Les modèles familiaux ont changé. La famille nucléaire classique n’est plus le modèle unique tout au long de la vie et il est généralement admis que ce qui prime pour un.e enfant est d’être aimé.e, sécurisé.e et accompagné.e dans son développement, y compris avec un beau-père, une belle-mère, un.e seul.e parent (souvent la mère), des grands-parents chez qui il ou elle vit… et même deux parents de même sexe.

La PMA aujourd’hui

Les femmes seules ou homosexuelles qui forment un projet parental sont contraintes d’aller à l’étranger pour le concrétiser. En fonction de leurs moyens financiers et de leur connaissance de la loi locale, elles peuvent privilégier la Belgique, les Pays-Bas, l’Espagne ou la Grèce… Dans certains pays, l’intégrité physique des femmes n’est pas toujours respectée, l’hyperstimulation ovarienne peut, par exemple, avoir des conséquences mortelles pour les femmes.

Lorsque la procédure aboutit à une grossesse dans un couple de femmes homosexuelles, la loi française ne reconnaît pas pour autant de façon systématique la double parentalité de l’enfant, à savoir la femme qui l’a porté.e et l’autre parent. Le couple doit obligatoirement se marier, et la mère non-biologique doit adopter son enfant pour que son autorité parentale soit pleinement reconnue par la loi. Cette décision est laissée à l’appréciation des juges aux affaires familiales.

Une loi, maintenant

Le président Macron avait fait de l’ouverture de la PMA à toutes les femmes une de ses promesses de campagne. Selon un sondage Ipsos-Sopra Steria pour France Télévisions et l’émission Questions directes, rendu public le 13 juin, 75 % des Français.e.s (70 % des hommes, 80 % des femmes) sont favorables à l’ouverture de la PMA à toutes les femmes. Les États généraux de la bioéthique, quoi que largement noyautés par les groupes conservateurs et les religieux, ont également révélé un consensus dans la société.

Lorsqu’une mesure politique constitue une avancée sociale incontestable au nom du principe de l’égalité, qu’elle bénéficie du soutien de l’opinion, elle doit être engagée sans peur. Un droit n’est pas une obligation, et l’ouverture de la PMA à toutes les femmes n’en enlèvera pas l’accès aux couples qui en bénéficient déjà. La pression de groupes tels que La Manif pour tous ne doit pas dicter nos droits. Un choix de société s’offre à nous : voulons-nous avancer vers plus d’égalité ou reculer devant les drapeaux roses et bleus ?

Carine Delahaie et Gwendoline Coipeault

Commandez le numéro 168 (juillet 2018) de Clara magazine et découvrez tous nos autres articles.