Le CSA s’engage contre le sexisme : vigilance et recommandations

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Sylvie Pierre-Brossolette, membre du CSA et présidente du groupe de travail « Droits des femmes »

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel –   CSA  – s’empare désormais de la question du sexisme et de l’image des femmes véhiculée par les médias. Échange avec Sylvie Pierre-Brossolette, membre du CSA et présidente du groupe de travail « Droits des femmes », journaliste, éditorialiste politique dont la carrière prestigieuse n’a pas entamé sa détermination à faire évoluer la condition et la place des femmes.

Les droits des femmes ont été l’an dernier un sujet fort pour le CSA avec la délibération de février 2015. Quel en a été l’impact ? Comment accompagne-t-elle la présidente du groupe de travail que vous êtes au sein du CSA ?

La délibération de février 2015 est un temps fort de l’application de la loi du 4  août 2014. Elle en fixe les règles d’application. Chaque année, les télévisions et radios doivent nous déclarer leur évaluation de la présence des femmes sur leurs antennes. Une évaluation quantitative, mais aussi qualitative, pour les inciter à examiner – et donc à diminuer – le degré de stéréotypes dans leurs programmes. Ces déclarations sont rendues publiques par le CSA. Une forte pression s’exerce ainsi pour que la place faite aux femmes s’améliore d’année en année. Ce travail au long cours se fait en parallèle à un examen ponctuel des programmes. S’ils portent atteinte à l’image des femmes par des propos ou scènes dégradants, humiliants, sexistes, le CSA peut faire des observations, voire prendre des sanctions. Nous n’avons pas manqué de le faire depuis le vote de la loi.

En mai et juin derniers, le CSA a « épinglé » certaines émissions de téléréalité dont Bachelor, Les Anges et Le Mad Mag… C’est une première. Pouvez-vous nous en dire plus ? Pensez-vous que ces décisions auront un caractère « jurisprudentiel » ?

Le CSA a, en effet, pour la première fois fait des observations, et même prononcé une mise en garde ferme, pour le sexisme de certaines émissions de téléréalité. Nous n’aurions pas pu le faire avant le vote de la loi, faute de base juridique. Les chaînes savent désormais qu’elles ne peuvent pas dépasser certaines limites sans s’exposer à une réaction du CSA. Ces premières décisions ont valeur d’exemple. Je suis certaine que les chaînes en tiendront compte à l’avenir.

Comment avez-vous été alertée du contenu de ces programmes ?

Nous avons été alertés par plusieurs centaines de saisines de téléspectateurs et nous avons procédé à un examen approfondi de ces émissions.

Outre ces émissions de téléréalité, y a-t-il eu d’autres décisions du CSA liées à l’image des femmes ?

Depuis la loi du 4 août, nous avons envoyé plusieurs fois des observations pour sexisme. Deux fois en mars  2015 et de nouveau deux fois en janvier  2016, lorsque France télévisions et Radio France ont été mis en garde pour des manquements : un sketch dégradant de Jarry dans l’émission Comment ça va bien ! sur France  2 et des propos déplacés dans La bande originale sur France Inter.

Comment un.e téléspectateur.trice, auditeur.trice peut saisir le CSA pour alerter sur le contenu d’un programme, sur des propos tenus dans une émission de radio par exemple ?

Tout téléspectateur peut saisir le CSA pour alerter sur le contenu d’un programme. Nous recevons de nombreuses saisines, sur les femmes comme sur tout autre sujet.

Est-ce que le CSA peut s’auto-saisir pour dénoncer un programme portant atteinte à l’image des femmes ? Ou est-ce que le Conseil doit attendre les dénonciations par les citoyen.ne.s via son site internet ? Si oui, combien faut-il de saisines pour déclencher une procédure ?

Nous pouvons nous auto-saisir. Il n’y a pas d’obligation de saisine extérieure pour examiner un programme. Mais il est vrai que, compte tenu de l’étendue de l’offre audiovisuelle, l’aide des téléspectateurs est la bienvenue.

La publicité véhicule malheureusement de nombreux stéréotypes sexistes. Est-ce que c’est un sujet dont vous allez vous saisir ? On peut dénoncer une publicité sexiste auprès de l’ARPP* et du Jury de déontologie publicitaire. Est-il possible d’envisager un travail du CSA avec ces deux entités pour être plus efficace ?

Sur la publicité, nous avons entamé un dialogue constructif avec l’ARPP qui vient de modifier sa recommandation pour y intégrer la notion de sexisme. Nous espérons vraiment qu’ainsi un filtre plus vigilant s’instaurera pour éviter les publicités trop sexistes. Nous ne manquerons pas d’inciter les instances de l’ARPP à appliquer leurs nouvelles dispositions.

Propos recueillis par Sabine Salmon

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