#stopvioldjibouti

#stopvioldjiboutiLes femmes afars sont des Femen. Qui en doute  ne sait rien de ce qui fait le combat de ces femmes. Qui ne comprend pas ce pacte féministe, ne connaît pas cette douleur commune qui étreint les femmes depuis la nuit des temps, des premiers rayons  de leur vie jusqu’au rideau tombant sur leur crépuscule.  Il y a encore dix ans, les femmes afars, lionnes  de la corne de l’Afrique, vivaient le torse nu,  les hanches enrobées dans un pagne aux couleurs vives. Cette légèreté de mouvement cachait cependant les cicatrices des mutilations sexuelles pratiquées depuis des temps lointains sur leur corps, les réduisant à la douleur et la peur. La liberté n’est qu’apparente. Aujourd’hui, des conteneurs de tee-shirts leurs sont imposés par les riches pays du Golfe au nom de l’islam  contre quelques programmes d’éducation ou de santé.  Leur corps est une fois de plus l’enjeu d’une guerre de territoires qui commence par la confiscation  du droit fondamental à en disposer comme elles  le souhaitent. Comme si le poids du patriarcat  qui pèse sur elles ne suffisait pas à leur malheur,  les femmes afars de Djibouti* subissent depuis 1991 les viols massifs de l’armée gouvernementale  des dictatures successives, dont celle du président actuel, Ismaël Omar Guelleh. Ses soldats « punissent »  les populations civiles, en violant les femmes, dans les villages où l’opposition à cette dictature existe.  Ces femmes ne sont, le plus souvent, même pas engagées en politique. Bergères, elles surveillent leurs troupeaux, sont de corvée d’eau ou se rendent d’un village à l’autre pour visiter un proche quand  ces hommes les violent, parfois devant leur famille, afin de terroriser tout le village. Femmes afars, Femmes solidaires, Femen, Assemblée des femmes, CNIDFF… Le combat contre les violences  faites aux femmes est notre bien commun : ne jamais se laisser faire, ne jamais accepter le sort qui nous  est réservé. Dix femmes djiboutiennes se sont misent  en grève de la faim en France pour protester contre  les viols, leur impunité et le silence de la communauté  internationale. Femen, avec leur corps, elles ont protesté jusqu’à se mettre en danger physiquement. Naturellement, quand l’une d’entre nous sort de l’ombre, 100, 1 000 femmes se rassemblent derrière elle. Les femmes afars sont des Femen.

Carine Delahaie

*  Les afars vivent dans trois pays de la corne de l’Afrique : à Djibouti,  en Éthiopie et en Érythrée.

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