Numéro 196 – Mars 2023

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Marre du 8 mars… 

Vous connaissez cet adage qui dit : « La culture c’est comme la confiture, moins on en a plus on l’étale ! » Eh bien ces dernières années, à chaque 8 mars, Journée internationale pour les droits des femmes, cette phrase tourne dans ma tête. Ne sentez-vous pas, comme moi, ce pincement au coeur, cette colère monter en vous, ce volcan qui n’attend que l’explosion, à chaque veille du 8 mars encore trop souvent appelée « journée de la femme » ? Marre de cette fausse complaisance de toutes ces institutions misogynes qui nous expliquent chaque année ce qu’il faudrait faire pour vivre à égalité avec les hommes mais qui ne le font pas. De ces hommes politiques, de ces cadres hautement placés, de ces présidents de prestigieuses institutions qui violentent les femmes, les bafouent et les harcèlent et dont les hémicycles, les entreprises et les fédérations s’indigneront, cette année encore, hypocritement, lors de cette journée de lutte. Marre de ces centaines de thèmes plus agaçants les uns que les autres : les femmes et l’art, les femmes et l’Europe, les femmes et la science, les femmes à la ville, les femmes et l’écologie, les femmes à la plage, les femmes à la campagne, les femmes et le travail, les femmes et les fleurs… STOP !!! 

Toutes ces thématiques occultent le lien qui existe entre les inégalités et les violences sexistes et sexuelles, ce que nous dénonçons dans un vide sidéral : le continuum des violences. Les femmes sont victimes des 262 journées qui séparent le 8 mars du 25 novembre quand ce continuum des violences passe sous silence dans un long tunnel où on ne l’entend plus. 

Nous voulons moins de mots et plus d’actes. Déjà 23 féminicides en ce début mars, 127 en 2022. Il ne sert à rien de nous donner des droits et de ne pas les appliquer. Il ne sert à rien de nous caresser d’une main dans le sens des poils et de nous étrangler de l’autre. Il ne sert à rien d’élever les consciences et la vigilance d’une société et nommer les violences quand leurs auteurs restent impunis et que les victimes baignent dans leur honte. Vous le comprendrez, j’ai l’impression de trahir ma cause, de trahir les miennes, de me trahir moi-même, quand j’accepte chaque année d’être la caution, une journée par an, de toutes ces organisations, institutions et politiques publiques qui peinent à changer radicalement la vie des femmes car elles refusent toujours de changer radicalement de modèle de société. 

Clara, si tu voyais ces guerres dont nous sommes toujours les butins, si tu voyais ce que le monde a fait de nous les féministes, des faire-valoir, des symboles et des médailles dans les vitrines de nos désillusions. 

Carine Delahaie

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