143 000 enfants vivent dans un foyer où les femmes sont victimes de violences conjugales, physiques et sexuelles.
143 000 coeurs à la dérive qui n’auront toute leur vie de cesse que de chercher des preuves de vie, des preuves d’amour. Espérer c’est chercher une preuve que l’aube reviendra et qu’après le néant, la nature, les éléments reprendront leurs droits. Le vent viendra ouvrir leurs poumons dans un souffle salvateur, purificateur. Vivre c’est trouver des preuves d’amour.
Ces enfants que nous connaissons ne trouvent-ils pas grâce à nos yeux ? Allons-nous continuer encore des siècles de chemin de croix, de sacrifices, remettre en cause leur parole et donc leur existence dans un silence complice.
Aux confins de l’été, le sourire d’une fillette brune est venu nous sortir de notre torpeur estivale. Son sourire figé dans l’horreur d’une disparition « inquiétante » viendra-t-il rejoindre celui des enfants martyrs d’une société qui banalise encore les violences faites aux enfants.
143 000 âmes, un chiffre, pas un drame. Pour 57 200 d’entre eux, d’entre elles, aux bleus du coeur, s’ajouteront les bleus du corps, pourquoi s’en priver si maman ne dit maux… Pour une enfant c’est moins grave, pour un enfant c’est rien, ça passera, puis ça ne passe pas… On grandit, bien sûr, bien sûr on change, mais on n’oublie pas.
La justice d’un pays se mesure au traitement infligé à ses prisonniers, son humanité à la manière dont il prend soin de ses enfants et des enfants des autres. Les enfants sont les sans-papiers de nos familles, Sans mémoire ? Sans avenir ? Qui viendra demander des comptes pour ces 143 000 enfants ? Même pour un peu de tôle froissée, le constat est systématique. Réparation est faite. La situation est expertisée. Pour un enfant, c’est le plus souvent le silence, la peur et la nuit… Et moi la nuit, le gras de cette société me soulève le coeur, je vomis ces minables qui protègent mieux leur écrans plats que leurs enfants.
Vivre, survivre, c’est chercher des preuves d’amour, des preuves de vie, chercher une main tendue pour ces enfants que nous croisons, ces enfants que nous sommes.
Carine Delahaie
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