Édito : Faire le deuil de qui nous étions

Sans ironie aucune en se remémorant ces oeuvres, ces artistes, en revisitant ces rendez-vous télévisuels qui ont produit du rêve et nous ont souvent aussi procuré du plaisir, donné l’envie d’avancer dans la vie, je me rends compte après une année de libération de la parole dans le milieu artistique qu’il nous faut faire le deuil d’une partie de notre enfance et de notre adolescence. La tumeur est énorme. Les exemples sont infinis de programmes, de chanteurs, d’acteurs, de chefs d’oeuvre du cinéma qui furent les théâtres de violences faites aux femmes ou qui véhiculèrent les idées les plus phallocrates ou tout simplement la haine des femmes. Comment faire l’impasse sur ces posters de David Hamilton accrochés dans nos chambres d’adolescent.e.s, ces séquences du Cocoricocoboy avec ses playmates et son gong noir tout droit sorti des colonies, l’adipeux Benny Hill harcelant sexuellement toutes les filles qu’il croisait, même celles qui avaient l’air d’être sa petite-fille, combien de shows des Carpentier (et si…) avec des potiches et des jeunes chanteurs à la moustache 70, de Sardou, de Claude François, la main conquérante sur la hanche d’une Jeane Manson ou d’une Petula Clarke soumises et souriantes. Combien enfin de soirées sur M6 en pyjama devant Cosby show, avec la gentille famille Uxtable dont l’acteur Bill Cosby […]

La culture du viol, sous le soleil exactement

Ces cartes postales vous les connaissez toutes et tous, images sexy pour certain.e.s ou objets sexistes pour d’autres, elles sont en vente dans la plupart des magasins de souvenirs et des librairies des zones touristiques. Femmes solidaires est à l’initiative d’une campagne estivale dénonçant la vente de ces cartes postales. Difficile de les trouver à Paris ou Lyon où elles sont quasi inexistantes. Elles pullulent toutefois dans les villes de Bretagne et des Bouches-du-Rhône, même les plus chics. Cet été, l’association Femmes solidaires, présente dans 190 villes de France, a lancé une campagne nationale pour dénoncer l’impression et la vente de cartes postales sexistes, souvent grossophobes et parfois même racistes. Selon l’association féministe d’éducation populaire, « elles concourent à la “culture du viol” qui impose une image dégradante des femmes, et participent à légitimer et banaliser les violences faites aux femmes ». Ces cartes postales sont disponibles, étalées à la vue de tous et toutes. Elles peuvent être vendues, y compris les plus explicites, quel que soit l’âge des clients. Le fait de vendre des contenus à caractère pornographique aux mineurs demeure illégal. Or, certaines cartes mériteraient largement une classification porno… Chaque jour, Femmes solidaires a donc posté sur les réseaux sociaux une […]

Ceija Stojka – La mémoire dans la peinture

Ceija Stojka, rom autrichienne, a été déportée et devient artiste peintre après son retour des camps. Son oeuvre, marquée par le traumatisme de l’expérience concentrationnaire, est un témoignage de l’horreur de celle-ci et de la résilience. Deux expositions, deux ouvrages et un documentaire l’ont mise à l’honneur en 2018. 2018 aura été l’année Ceija Stojka. La Maison rouge a en effet accueilli au printemps dernier une première exposition de l’oeuvre de l’artiste rom autrichienne avec près de cent-cinquante de ses peintures ou dessins rassemblés. Un hommage à la hauteur de la vie hors du commun de l’artiste encore méconnue. Ceika Stojka est née en 1933. Déportée à l’âge de dix ans avec sa mère, ses frères et soeurs, elle survit à trois camps de concentration (Auschwitz-Birkenau, Ravensbrück et Bergen-Belsen). Elle est libérée en 1944. L’art et la mémoire La mémoire de la déportation est un chemin qui la mène, quarante ans plus tard, à raconter par l’écriture poétique ce qu’elle a subi. Ses poèmes sont pour la première fois rassemblés, traduits en français et publiés en 2018 sous le titre Auschwitz est mon manteau et autres chants tziganes 1. Par la suite, son art s’exprime aussi par le dessin et la peinture qu’elle […]